Malade depuis deux ans, à l’agonie depuis plusieurs mois, le Roi Lyon s’est éteint, hier soir, à Nicosie. L’Olympique lyonnais ne poussera donc pas l’escroquerie jusqu’à intégrer le « grand huit européen » cette année. Il s’en est fallu de peu, tant son adversaire, au budget huit fois inférieur, était à sa portée. Mais le duo Aulas-Lacombe, Garde, son staff et l’équipe lyonnaise la plus faible depuis quinze ans ont finalement connu la débâcle. De celles qui marquent à jamais...
Le Roi Lyon est né en Europe un soir d’automne 1995, à Rome. C’est d’ailleurs avec ce titre à sa « Une » que l’Equipe salua l’exploit de Florian Maurice, Eric Roy et leurs copains, au Stadio Olympico, quand l’OL sortit en seizièmes de finale de la Coupe de l’UEFA la Lazio de Rome de Signori, Boksic et Nesta, alors leader du Calcio après avoir détruit quelques jours plus tôt la Juventus 4-0.
Ce roi a grandi, puis régné presque une décennie sur ses pénates hexagonales, tutoyant même deux années, mais finalement d’encore assez loin, le sommet continental, et sauvant surtout à lui tout seul les deuxième et troisième tickets offerts au football français en Ligue des Champions.
Durant ce règne, devant toute l’Europe, il a dévoré tout cru deux années de suite le Real Madrid des Galactiques à Gerland, assommé le Bayern Munich en poule l’année du dernier sacre continental des bavarois, étrillé le Werder de Brème 7 à 2 dans une symphonie de football parfaitement achevée. Et tant d’autres exploits encore.
C’était le temps où le roi était si sûr de sa force qu’il fêtait son 5ème titre national avec la crinière peinte en rouge, dansant sur la gueule de sa voisine la panthère noire à Gerland, ou s’amusait au Parc des Princes encore plein du champagne bu dans la nuit qui avait précédé l’officialisation précoce de son 6ème sacre.
Mais le roi a vieilli. Il s’est égaré. Et s’il a su toujours rester digne, il a fini par capituler. Les jeunes loups parigo-qataris ne lui laisseront rien. L’Europe encore moins. Le Roi Lyon est mort. Vive le Roi Lyon !
La débâcle de Nicosie
Débâcle ! Le mot n’est pas trop fort, même après une courte défaite, même pour une élimination aux tirs aux buts.
Cet affreux match, indigne du printemps de la ligue des champions (vous me direz, nous sommes encore en hiver…), a cristallisé tout ce qui fait que l’Olympique lyonnais aujourd’hui ne fait plus peur à personne, s’inclinant piteusement tour à tour face à Caen, à Nancy… ou à Nicosie.
Cette équipe joue sans âme, avec deux talents en tout et pour tout qui ont fini, lassés, par rejoindre la nullité ambiante. C’est comme si Lloris et Lisandro avaient épuisé toute leur énergie, toute leur envie, tout leur talent, dans cette lutte permanente et vaine de tirer vers le haut leurs obscurs coéquipiers. Ils sont devenus médiocres et inutiles.
Cissokho et Briand ne sont pas des joueurs de football. Ce sont des coureurs à pied, dont le niveau technique ferait à peine rougir quelques bons joueurs de district. Cris et Kallstrom disputent chaque rencontre à la vitesse de leur prochain jubilé. Et malgré ça, il leur arrive encore parfois d’être les meilleurs…
C’est dire le niveau général. Techniquement, le constat est pathétique et trop ridicule pour être vrai. Des passes à cinq mètres qui finissent en touche, des dégagements à l’emporte-pièce « dévissés » une fois sur deux, des touches ratées comme chez les pré-débutants… Minable, honteux.
Et le pire, dans tout ça, c’est que les joueurs semblent à peine touchés. Presque non concernés pour la plupart d’entre eux. C’est le plus insupportable. Et la principale cause du désamour qui est en train de naître.
Garde, la fin de l’état de grâce
Les quadras qui supportent Lyon depuis longtemps versèrent tous une petite larme lorsque Rémi Garde, capitaine emblématique d’une équipe à la jeunesse triomphante, décida de quitter l’OL pour Strasbourg. Son retour à Lyon après sa carrière de joueur fut une grande joie, sa prise de fonctions comme entraineur une évidence pour beaucoup.
Malheureusement, cette première expérience à la tête d’une équipe professionnelle est un échec. Cuisant. Son coaching est souvent très discutable, ses choix de départ parfois totalement incompréhensibles. Briand et Cissokho sont titulaires depuis le début de saison : c’est une hérésie. Il faut être aveugle pour ne pas se rendre compte que l’OL joue la plupart du temps à 9.
Qu’il lance les jeunes ! Ils ne feront pas pire, c’est une certitude ! Ils apporteront au moins leur enthousiasme, leur fraîcheur, leur envie. Qu’il se souvienne, Rémi, que son alter ego de la charnière centrale qui propulsa l’OL en Ligue 1, Bruno N’Gotty, démarra en pros à 16 ans.
Sans aller jusqu’à cette précocité, qu’il regarde vers le bas. C’est son seul salut. L’état de grâce est passé. Samedi soir, lorsque les Dogues lillois auront piétiné la carcasse du Roi Lyon encore chaude, il rentrera dans l’infernal engrenage de l’entraineur critiqué de toutes parts et dont les jours sont comptés. Comme avant lui Alain Perrin et surtout Claude Puel.
Aulas-Lacombe, le retour du Muppets Show
A les voir, tous les deux, hier soir dans la tribune, dans un mimétisme souvent saisissant, j’ai bizarrement cru revoir les deux papys du Muppets Show…
Des déclarations malheureuses et déplacées aux analyses grotesques, le duo qui a joué le premier rôle dans la fabuleuse histoire récente de l’Olympique lyonnais, semble désormais manqué clairement de discernement.
Ils ont vieilli, ces deux vieux lions. Légitimement aveuglé par la quête de la ligue des champions, Aulas a multiplié depuis cinq ans les erreurs de recrutement, dilapidant son trésor dans des investissements dispendieux abracadabrantesques. Cissokho 15 millions ! Keita 18 millions (alors que Loïc Rémy attendait son heure). Pour ne citer que deux exemples d’une interminable série.
Et demain le Stade des Lumières. 60000 personnes attendues… Mais pour y voir qui ? Cette pauvre équipe ? Aulas doit prendre du recul, renouveler ses conseillers et expliquer à Bernard Lacombe qu’il est temps pour ce dernier de faire son pot de départ.
En attendant le sien, qu’il doit d’ores et déjà anticiper, le président lyonnais doit foncer au plus vite là où l’oseille pullule : dans le Golfe. Quitte à céder son trône. C’est la triste loi de la jungle du foot. Le Roi Lyon est mort. Vive le Roi Lyon !
- Charelca -