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28 juillet 2010 3 28 /07 /juillet /2010 20:20

           

Suite du bilan de la Coupe du monde disputée en Afrique du Sud. Après le focus sur le triomphe espagnol, retour sur l’un des faits les plus marquants de ce tournoi : la chute libre de l’arbitrage au haut niveau...

 

 

            Howard Webb s’est déclaré satisfait de la qualité de son arbitrage lors de la grande finale de la coupe du monde. Si c’est de l’humour anglais, il fait beaucoup pour sa publicité, car le milliard de téléspectateurs présent devant son écran ce soir-là ne partage pas, c’est un doux euphémisme, la même analyse.

En optant pour la clémence sur quatre agressions de Van Persie, Van Bommel, De Jong et Sneijder, qui auraient pu valoir aux Pays-Bas autant d’expulsions directes en une seule mi-temps, il a, en effet, conclu en laideur tout ce que le reste de la compétition avait déjà affiché au grand jour : que l’arbitrage au plus haut niveau est aujourd’hui en pleine déconfiture.

 

Plus grave, ce phénomène révèle que la FIFA se trouve aujourd’hui dans une impasse dont il est urgent de se sortir, sous peine de casser le beau jouet.

Pourtant, l’antidote semble désigné et connu de tous : le recours à la vidéo.

 

L’arbitre, la mauvaise cible

 

            Ceux qui suivent le football anglais et la Ligue des Champions savent que Monsieur Webb est un excellent arbitre, un des meilleurs européens. Le compliment vaut aussi pour Monsieur Rosetti, l’arbitre italien qui a dû valider un but de Carlos Tevez, tout en sachant pertinemment qu’il était entaché d’un hors-jeu, lors du 1/8ème de finale Argentine-Mexique.

Que cela tombe sur eux est cruel mais c’est une bénédiction. C’est avec les meilleurs directeurs de jeu de la planète qu’est jetée à la face du monde l’incurie de l’arbitrage du XXIème siècle. Rien de tel pour déstabiliser la FIFA, voire la décrédibiliser.

 

Car il ne faut pas se tromper de cible. L’homme en noir ne fait souvent qu’appliquer les consignes qui lui sont dictées.

Le cas de Roberto Rosetti en est l’illustration la plus parfaite. Au comble du ridicule, il fut contraint d’accorder un but non valable en toute connaissance de cause ! En l’espèce, on frôle même le délire sadomasochiste puisque, tout en ne faisant qu’appliquer les directives qu’on lui a données, l’arbitre italien savait que cela le condamnerait pour la suite de la compétition ! Ce qui n’a pas manqué d’arriver d’ailleurs… Grotesque !

Quant à Monsieur Webb, pour aller encore plus loin, on peut même avancer l’hypothèse que s’il n’a pas expulsé d’entrée de jeu un hollandais en finale, c’est uniquement parce qu’il craignait que certaines instances lui reprochent, à demi-mots au moins, au nom du spectacle, d’avoir déséquilibré les débats trop tôt. Ce n’est pas une excuse, mais l’esquisse d’une explication à son étonnant manque de discernement tout au long de la rencontre.

Cette forme de pression exercée sur le corps arbitral, minimisée à tort et assez méconnue, est bien sûr insupportable, tant sur le fond que sur la forme. Mais c’est la triste réalité et ce même si, pour être tout à fait honnête, l’expulsion de Nigel « Bruce Lee » De Jong n’aurait, à coup sûr, jamais prêté à discussion ; bien au contraire, on aurait probablement vanté alors le courage de l’arbitre anglais d’« avoir pris ses responsabilités », même dès la 29ème minute.

 

Cela étant, les erreurs d’arbitrage sont parfois bien humaines et ce n’est pas l’Angleterre et Frank Lampard qui diront le contraire, floués d’une égalisation contre l’Allemagne, dont on ne saura d’ailleurs jamais si elle aurait changé la face de ce 1/8ème de finale.

Cette erreur fut la plus marquante, mais on a pu en compter des dizaines d’autres, à chaque match ou presque de ce tournoi.

Les arbitres seraient-ils alors moins compétents qu’auparavant ? Notre Michel Vautrot national ferait-il mieux aujourd’hui ? Bien sûr que non. L’arbitrage moderne souffre seulement de l’évolution du jeu, d’une obsolescence caractérisée, liée à l’impossibilité pour un seul homme, même avec trois adjoints sur la pelouse, de tout voir et tout gérer, tout en courant, sprintant, parlant et replaçant son oreillette pendant 90, voire 120 minutes. C’est aussi simple que cela.

Tout va aujourd’hui trop vite : les courses, les passes, les frappes, le jeu dans son ensemble. Et comme les joueurs, plus jeunes, ont tous ou presque remplacé leurs leçons de mathématiques par des cours de comédie, tout est devenu plus compliqué. Ingérable même.

 

La FIFA doit réagir

 

            En annonçant que 96% des décisions prises par les arbitres durant cette coupe du monde étaient les bonnes, la FIFA ne dupe personne et se ment à elle-même. Car les 4% manquants sont uniquement ceux que l’on retient. Pour une raison simple : ce sont ces décisions-là qui sont dommageables, celles qui tronquent souvent le résultat d’une rencontre.

D’ailleurs, quel sens donner aux excuses présentées par le président de la FIFA, Joseph « Sepp » Batter, aux peuples mexicain et anglais au lendemain des bourdes précitées, si ce n’est celui de la reconnaissance implicite de cette situation d’échec ?

 

Or, tout le monde le sait bien, les enjeux économiques tout autant que l’universalité de ce sport, rendent aujourd’hui l’injustice insupportable. A court terme, l’effet majeur de ce phénomène sera une perte de crédibilité pour le football ;  à moyen terme, une épine tellement grosse dans le pied de la FIFA qu’elle menacera de crever la poule aux œufs d’or.

Oui, l’image du football s’est écornée pendant cette coupe du monde et avec elle, celle de la FIFA. C’est que les autres ont pris de l’avance : le basket le premier, le rugby ensuite, le tennis en dernier lieu, ont tous remédié avec un franc succès à leurs déboires liés à l’arbitrage.

 

Pour sortir la FIFA (et les autres instances, UEFA en tête) de cette impasse, chacun sort sa boîte à idées ; pour certains il faudrait un deuxième arbitre de champ, pour d’autres deux assistants supplémentaires nettoyeurs de surface (c’est l’arbitrage à cinq sur le terrain, déjà expérimenté par l’UEFA en Ligue Europa cette année et qui sera étendu à la Ligue des Champions pour les deux prochaines saisons), sans oublier, bien sûr, la vidéo. Pour beaucoup, cette dernière option serait la solution miracle, le précieux antidote !

Parfait ! Néanmoins, alors qu’on en parle déjà depuis quinze ans au moins, le sérum magique n’est toujours pas en circulation. Alors pourquoi ? La FIFA est-elle gérée par des fous ? Ou serait-elle insuffisamment puissante pour faire infléchir quelques vieillards à majorité britannique, « garants » de l’esprit des lois et du jeu ? Bien sûr que non.

Si la vidéo n’est pas encore en place, c’est parce que les modalités pratiques de sa mise en œuvre sont encore incertaines, qu’il plane sur son mode de fonctionnement des ambiguïtés et que, c’est vrai, tous les grands décideurs ne sont pas encore sur la même longueur d’ondes. Malheureusement pour eux, ils n’ont plus de temps. Et parions ici que la prochaine coupe du monde, en 2014, ne célèbrera pas que le Brésil terre de foot, mais aussi la vidéo.

 

La vidéo oui, mais comment ?

 

            Sepp Blatter s’est dit prêt à étudier le recours à une assistance technologique, au moins pour assurer à l’arbitre le franchissement ou non par le ballon de la ligne du but. Ouf ! On avance… Ce dossier sera donc à l’ordre du jour de l’assemblée générale annuelle de l’International Football Association Board (IFAB) en octobre prochain.

Si cette étude débouche sur des avancées concrètes, ce sera alors un progrès notable mais encore nettement insuffisant ! Trois autres dysfonctionnements au moins méritent une correction immédiate : l’absence de main ayant pourtant conduit à un pénalty, le but après une position de hors-jeu (flagrante) et la faute grossière sifflée à l’extérieur de la surface de réparation, alors qu’elle a été commise à l’intérieur de celle-ci, et inversement.

 

Une fois listés les actes du jeu entrant dans le champ d’application de ce nouveau moyen d’action, reste à en fixer les modalités pratiques d’utilisation. C’est là que ça coince…

 

Pour les uns, une assistance vidéo devrait être mise à la disposition du quatrième arbitre, l’homme-sandwich au panneau lumineux. C’est une ânerie, sauf à revoir complètement le rôle de celui-ci. Géographiquement très mal placé, entre les deux bancs, il a pour l’instant vocation à calmer les ardeurs des entraîneurs et de leur banc respectif, et non à créer une émeute au bord de la touche, ce qui ne manquerait pas d’arriver au premier dilemme auquel il devrait faire face devant son petit écran.

 

Pour d’autres, il faudrait donner la possibilité aux deux capitaines (ou aux deux entraîneurs) de demander l’utilisation de la vidéo une ou deux fois par mi-temps. Après mûre réflexion, ce n’est pas satisfaisant et ce, pour deux raisons majeures : d’abord, on changerait radicalement la philosophie de l’arbitrage puisque l’arbitre ne dirigerait plus seul les débats, l’initiative de l’arrêt du jeu étant laissée à la discrétion des équipes.

Ensuite, on se heurterait très rapidement à des débordements : ainsi, en offrant aux équipes la possibilité d’arrêter le jeu à leur guise, certains acteurs comprendront vite qu’ils pourront utiliser cette règle à d’autres fins que sa portée initiale ; par exemple, demander le recours à la vidéo pour contester un hors-jeu, même net et sans bavure, dans le but de « casser » le jeu, le rythme, la pression brûlante de l’adversaire, ou de laisser à un coéquipier blessé le temps de récupérer, etc.

On pourrait rétorquer à cet argument que l’arbitre pourrait très bien garder une liberté d’apprécier la demande formulée par le capitaine. Certes, mais cela complique sérieusement l’affaire, prête à interprétation et l’on file alors tout droit à l’opposé de ce qui était souhaité au départ, à savoir simplifier la tâche de l’arbitre.

 

Une troisième hypothèse semble néanmoins envisageable : la création d’un nouvel arbitre assistant,  placé en loge, disposant de la vidéo et qui pourrait communiquer, via la fameuse oreillette, les informations à l’arbitre principal sur les faits de jeu susmentionnés.

Il resterait ensuite à trancher entre deux options : soit, à l’instar du rugby, l’initiative du recours à la vidéo est uniquement laissée à l’arbitre principal, ce qui présente l’avantage de le maintenir comme le maître du jeu, mais aussi l’inconvénient de passer encore à côté de quelques bévues, soit de compléter ce processus en donnant au nouvel assistant la liberté d’alerter le boss à tout moment, ce qui permettrait à la fois de réduire encore le nombre de méprises mais aussi de signaler, par exemple, une agression en dehors du jeu qui aurait échappé à l’arbitre principal.

C’est une proposition comme une autre, qui ne corrigerait pas toutes les erreurs, mais qui, assurément, en réduirait fortement le volume…

 

 

            Michel Platini répète inlassablement que l’arbitre fait partie intégrante du jeu et que le recours à la vidéo, qui n’est pas toujours un gage de certitude, dénaturera le sport de sa vie. Il fait donc abstraction de ce qu’il subit un soir andalou où il croisa le regard barbare d’Harald Schumacher qui venait de massacrer Patrick Battiston et, rien que pour cela, il force le respect.

Mais s’il a parfaitement raison sur la forme, il se trompe sur le fond : c’est justement parce que la vidéo n’est pas infaillible que son recours ne doit être perçu, étudié et mis en place que comme une aide à l’arbitre. Celui-ci pourra  donc très bien rester le maître des débats, pour peu que le mode de fonctionnement de la vidéo lui laisse le libre-choix d’y recourir et/ou de l’appliquer, ou non. Donc de décider.

 

- Charelca -

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commentaires

P
<br /> Très bonne analyse dans lecontexte de l'arbitrage du football particulièrement difficile où l'on sait forcément qu'aucune machine ne pourra ici remplacer l'homme.<br /> <br /> Je trouve que la seconde solution de la troisième hypothèse parmi ces propositions représente la solution la moins mauvaise et, par conséquent, soit la plus adaptée à l'aide que peut apporter la<br /> vidéo dans ce sport.<br /> <br /> Patsso<br /> <br /> <br />
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  • Charelca, bientôt quadra, amoureux du foot et de sa dramaturgie unique. Enfant de Séville, fan de Platoche, il n'y a qu'une place pour un club dans mon coeur. En revanche, l'esprit est ouvert pour accueillir avec bonheur tous les passionnés.
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